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7 octobre 2010 4 07 /10 /octobre /2010 07:00

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Le 29 janvier 1962, la première collection d’Yves Saint Laurent est présentée, rue Spontini, dans l'ancien hôtel particulier du peintre Forain. Une femme, au regard noir intense, est assise au premier rang. Elle est sur le point d’assister à la naissance d’un grand couturier comme elle a déjà vu tant d'autres : Poiret, Dior, Chanel, Balenciaga... Il est bien loin le quartier juif de Cracovie, où Helena Rubinstein est née en 1872. Que de chemin parcouru, de travail accompli, de nuits d’insomnies… Dans la biographie que lui consacre Michèle Fitoussi on découvre la vie de la self made woman qui, de petite polonaise sans le sou, deviendra « Madame », mais aussi l’histoire de la cosmétique et l’évolution de la condition féminine.

 

En 1902, Helena Rubinstein, ouvre son premier salon en Australie. La même année, les Australiennes votent pour la première fois. Faut-il y voir un signe ? Pas vraiment, le symbole est séduisant mais comme l’explique Michèle Fitoussi : « L’indépendance des femmes l’intéresse, mais de la seule façon qui compte pour elle, en libérant leur apparence ». Egoïste, Helena Rubinstein l’est sans conteste. Pour elle, seule compte la réussite. Certains lecteurs s’en agaceront, peu importe, sa fougue avant-gardiste en séduira d’autres.  En 1908, Helena Rubinstein se marie avec le très volage Edward William Titus. De cette union né un premier garçon, Roy, en 1909 puis un second, Horace, en 1912. Bien trop occupée, à la tête de son empire, Helena Rubinstein n’a pas le temps/l’envie de pouponner. Son bonheur est ailleurs. A la fin de sa vie, en y repensant, elle confiera : « J’ai donné à mes fils tout le confort et l’argent qu’un être humain peut recevoir. Mais leur ai-je donné assez de moi-même ? Je ne le crois pas… J’aurai aimé vivre 300 ans pour tout mettre en ordre dans ma vie. » Derrière la dame de fer, il y a évidemment une femme avec ses doutes, sa peur de vieillir, ses chagrins.

 

A travers les presque 500 pages de l’ouvrage, Helena Rubinstein se dévoile. On apprend sa passion pour les arts premiers, son engouement pour la culture, ses liens avec les artistes et les écrivains de l'époque. Helena Rubinstein ira même jusqu'à créer un prix d’art moderne, et prête une maison de campagne à Edmonde Charles-Roux, alors en pleine écriture de son premier roman. Helena Rubinstein se fait régulièrement croquer et photographier à la moindre occasion. « C’est bon pour la publicité, c’est un excellent investissement et ça garnit les murs vides. » Des portraits où elle ne manque pas de se faire rajeunir. Habituée à cacher les détails dérangeants voire même certains épisodes de sa vie, Helena Rubinstein s’est toujours plus ou moins arrangée avec la réalité. Ici, les zones d’ombres s'effacent enfin pour le plus grand plaisir du lecteur.

Mademoiselle

Michèle Fitoussi, Helena Rubinstein, éd. Grasset, 472 p., 22 €

Pour en savoir plus sur le livre de Michèle Fitoussi : http://www.helenarubinstein-lelivre.com/


Ce livre a fait l'objet d'un partenariat avecBlog-o-Book, merci à eux et aux éditions Grasset.


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5 octobre 2010 2 05 /10 /octobre /2010 07:43

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Les petits papiers de Mademoiselle reçoivent, Manuela Kongolo, l’auteur de Cocaïne et tête de veau paru aux éditions du Rocher. Dans son livre, la journaliste de Paris Match relate un fait divers qui s’est déroulé en Bretagne. En 2005, pour combler leurs dettes et sauver la boucherie familiale du désastre, deux frères se lancent dans le trafic de drogue. Pendant deux ans, Sylvain et Jean-Marc, mènent ainsi une double vie. S’appuyant sur un réseau de revendeurs constitué de carrossiers, de routiers et de marins pécheurs, ils deviennent les plus gros dealers de la région. Mais en 2007, la brigade des stupéfiants découvre leur petit manège. Sylvain et Jean-Marc sont envoyés deux ans en prison.

 

Comment avez-vous eu connaissance de cette affaire et pourquoi avoir décidé d’en faire un livre ?

En visionnant l’excellente émission Pièces à convictions, intitulée " Cocaïne, au cœur du trafic ", présentée par Elise Lucet. Dans le cadre d'un reportage illustrant la banalisation de la cocaïne, on découvrait deux frères bouchers qui pour sauver leur commerce de la faillite ont entrepris de se lancer dans le trafic de drogue. Leur profil, d’honnêtes commerçants élevés par des parents unis dans un petit bourg de Bretagne, si loin de tous les clichés concernant les trafiquants de drogue a suscité ma curiosité.


De quelle façon êtes-vous remontée jusqu’aux deux frères, Sylvain et Jean-Marc ?

J'ai d'abord recherché les articles de presse sur le sujet. Munie de leur nom, de celui de leur avocat, j'ai passé un coup de fil pour introduire ma demande


Lors de la première rencontre, étaient-ils « conformes » à l’image que vous vous étiez faites d’eux ?

Absolument ! De braves types un peu dépassés par les proportions qu'avait pris leur folle entreprise. Mais surtout, très marqués par leur passage en prison et les conséquences judiciaires de l'affaire. Une autre chose m'a également frappée en les rencontrant chez leurs parents, chez qui ils vivent depuis leur sortie de prison, c'est le climat paisible, l'affection palpable, la complicité qui unit cette famille. Encore une fois, un climat très éloigné de celui qui entoure en général les délinquants qui bien souvent sont issus de familles désunies et ravagées par les conflits.


Qu’est-ce qui vous a le plus heurtée dans leur récit des faits ?

Le choc qu'ont subis les parents qui ignoraient tout de leur trafic lorsqu'ils ont découverts de manière brutale que non seulement leur deux fils vendaient de la drogue, mais que le cadet était devenu dépendant. Et puis bien sûr, leur récit de leur entrée en prison, de la découverte d'une réalité carcérale, brutale, violente. Mais aussi, au travers des rencontres et des liens qu'ils y ont tissés, parfois surprenante, déroutante et émouvante.

 

Aujourd’hui, Sylvain dit qu’il « ne recommencerait pour rien au monde », tandis que Jean-Marc retenterait bien l’expérience s’il n’y avait pas ses parents, selon vous où est la faille dans le système carcéral français ?

Le fait de "mélanger" des primo-délinquants à des multirécidivistes. Avant la prison, les deux frères n'avaient jamais fréquenté de voyous puisque le trafic était organisé avec des connaissances, des relations qui n'avaient comme eux aucun antécédents judiciaires. Et voilà que la justice les envoie en maison d'arrêt. Sorte d'entonnoir où sont incarcérés tous sortes de criminels et de délinquants dans l'attente de leur procès à l'issu duquel, selon la gravité de leur infraction, ils seront placés dans des centres de détention où se retrouvent les courtes ou les longues peines. C'est ainsi que les frères se retrouvent à vivre au quotidien (durant dix-huit mois pour le cadet, deux ans pour l'aîné)  avec des meurtriers, des violeurs, des braqueurs, mais aussi des trafiquants chevronnés, pour la plupart récidivistes. Des délinquants en quelque sorte professionnels qui leur proposent de reprendre le trafic à la sortie, à une plus grande échelle. Et ce, avec le sentiment de leur offrir une véritable opportunité. Une réinsertion qui comporte des risques, mais qu'ils présentent comme lucrative et moins contraignante que la réinsertion classique qui oblige les trafiquants à s'acquitter, comme c'est le cas des frères, de lourdes amendes douanières et de pénalités fiscales, alors même que leurs bien ont été saisis.

 

Merci Manuela.

 

Manuela Kongolo, Cocaïne et tête de veau, éd. du Rocher, 210 p., 17 €

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4 octobre 2010 1 04 /10 /octobre /2010 07:00

securedownload[1]-copie-1

securedownload[1] (2)Les petits papiers de Mademoiselle reçoivent aujourd’hui Eric Poindron. Editeur, écrivain, critique littéraire, collectionneur de curiosités, marcheur, éleveur de chats et j’en passe. Eric Poindron vit, entourés de livres, au pied d’un phare dans la mystérieuse Montagne de Reims. Il se prend pour un poète et croit que les fantômes existent, ou l'inverse. Eric Poindron vient nous présenter la nouvelle collection dont il est le directeur, Curiosa & cætera, aux éditions du Castor Astral.

Quelle est la ligne éditoriale de Curiosa & Cætera ?
Difficile de résumer en quelques  mots la ligne éditoriale de la collection Curiosa & Caetera. J’ai toujours aimé les auteurs méconnus, dans les marges ou hors des écoles. De la même façon, j’aime les livres qui ressemblent à de « véritables » livres, à la facture soignée et à la typographie raffinée, des livres qui ressemblent à des objets, que l’on prend plaisir à manipuler ou à offrir, et où l’on peut encore deviner l’esprit de l’éditeur. La ligne éditoriale, ce sera ça, de beaux textes rares, parfois illustrés, qui réjouiront les amateurs de bibliophilie abordable et les curieux avides de textes insolites. Ainsi, la collection rééditera des ouvrages méconnus, ou iconoclastes, des auteurs hors des modes, possédant de véritables jardins secrets et souhaitant y inviter le lecteur.


Comment est né ce projet, est-ce vous qui l’avez proposé à Marc Torralba et Jean-Yves Reuzeau, les fondateurs du Castor Astral ?
J’aime depuis fort longtemps les éditions du Castor Astral, avec des auteurs comme Patrice Delbourg pour qui j’ai une affection toute particulière, ou la très belle collection Les inattendus qui rééditent des textes oubliés d’écrivains classiques ou confirmés. Voilà quelques années, Jean-Yves Reuzeau m’a fait part de son envie d’imaginer une nouvelle collection. Je lui ai alors expliqué que je souhaitais rééditer des textes introuvables, des œuvres insolites, des écrivains à la marge. Nous  nous sommes mis à réfléchir, avec la complicité de Marc Torralba, à l’esprit de la collection, aux choix des papiers. Très vite, et ce malgré les distances - Marc Toralba est à Bordeaux, Jean-Yves Reuzeau à Paris, et moi en Champagne - nous avons aussi imaginé de nouvelles méthodes de communication pour cette collection : création d’un blog, conversation et concertation avec les lecteurs, rencontres régulières avec le public, expositions et même la création d’une revue Curiosa & Caetera. En reprenant l’esprit du colportage d’autrefois, je sais qu’il est encore possible d’apporter le livre au lecteur en attendant que ce dernier se fasse à son tour colporteur. Après avoir commencé à dresser la liste de tous nos « morts, », nous avons décidé de faire aussi un de la place aux vivants. Dans un premier temps, ce sont donc quatre écrivains bien vivants qui vont ouvrir le bal.  Le plus jeune n’a pas 35 ans, et le plus âgé, Claude Seignolle, porte comme un gaillard ses 95 printemps.

Quel sera le premier titre publié ?
Le premier livre doit paraître début octobre. Il s’agit du Paradisier, de Frédéric Clément qui relate l’histoire singulière de Raphaël Moineau, un agent de surveillance, dont la main droite s’est figée, crispée en forme de tête d’oiseau, et de son voyage  du Louvre au Vésuve. C’est étrange roman inclassable à une force poétique rare. Il y est question d’anges, de Naples écrasée de canicule, d’un  petit boss bossu de la camora, d’une stripteaseuse qui se déplume au rythme du mambo-blues, d’un certain Don Passero, hagard, qui psalmodie à longueur de journée Le Paradis de Dante sur les remparts du castel du château de l’Œuf… Vous l’aurez compris, c’est un livre très Curiosa & Caetera, un roman à tiroirs remplis de plumes et de secrets, de personnages qui traînent leurs ombres et leurs anges fatigués. C’est aussi un roman illustré  par l’auteur, qui mélange avec un juste équilibre « le bel art » et la leçon de choses.

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De quoi mettre l’eau à la bouche, et après ?

Après, trois autres livres paraitront en même temps. Tout d’abord une nouvelle version du Château de l’étrange de Claude Seignolle. Véritable livre culte, épuisé et recherché par les amateurs de peurs insolites et de fantastique urbain le Château de l’étrange s’adresse à tous ceux que fascinent les aventures inexpliquées.

Et puis, toujours en octobre nous allons proposer au lecteur La petite Encyclopédie singulière du Cannabis, de Nicolas Millet, un livre qui a  la modeste prétention de réunir en un même volume tout ce que cette plante réunit de faits culturels, historiques et sociaux. Mais il fallait que « l’objet-livre » soit à la hauteur du sujet. C’est pour cette raison que nous avons pris le parti de faire un livre élégant, à la façon des manuels de civilité du siècle dernier.

Enfin, le petit dernier est un livre épatant. Il s’agit de Brefs, de Georges Kolebka, un auteur inclassable qui a reçu le Grand prix de l’humour noir.

C’est un recueil d’une centaine de récits qui vont de quelques lignes à quelques pages couvrant ainsi toutes les facettes du comique. Extravagances, cocasseries, excentricités, absurdités, Brefs, c’est burlesque et inattendu ! On peut en lire quelques pages ici ou là, quand on a cinq minutes, dans le train ou le métro, histoire d’oublier que le monde est absurde ou cruel.

Merci Eric.

Pour en savoir plus, rendez-vous sur le blog de Curiosa & Cætera

Et visitez les Cabinets de curiosités d’Eric Poindron, ça vaut vraiment le coup d’œil : http://blog.france3.fr/cabinet-de-curiosites/ et http://blog.france3.fr/eric-poindron/ 


Photos DR et Casajordi 

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2 octobre 2010 6 02 /10 /octobre /2010 10:21

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« Les gens n’ont aucune idée de la quantité d’informations qui sont conservées à leur insu sur les disques durs. Je dis souvent qu’un ordinateur est comme une mauvaise conscience. Il se souvient de tout et on ne sait jamais quand il pourrait se mettre à parler. » Après avoir lu La maison d’à côté, vous ne regarderez plus une page web de la même façon…

Un soir, à South Boston, Sandra Jones disparaît dans sa maison pourtant mieux fermée qu’un coffre-fort. Ree, sa fille de quatre ans, est le seul témoin dont la police dispose. Entre le mari froid et inexpressif, le voisin délinquant sexuel et le père de Sandra qui réapparait après des années d’absence, l’inspectrice D.D. Warren enquête. Sur son carnet, elle prend des notes mais les points d’interrogation se multiplient, les blancs aussi. Des personnages entrent en scène comme autant de sérial killer potentiels, à moins que l’on ne se méprenne sur leur compte… En effet, dans les récits d’une Lisa Gardner, passée maître dans la manipulation du lecteur, rien ne coule de source.

Thriller haletant, La maison d’à côté donne à voir les penchants les plus sombres de l’âme humaine. Seule, au dessus du lot, dans sa désarmante innocence, la petite Ree illumine tout sur son passage, un amour de petite fille qui ferait presque oublier la noirceur du monde. Retrouvera-t-elle sa maman ? Sa vie redeviendra-t-elle comme avant ?


Lisa Gardner,
La maison d’à côté, éd. Albin Michel, 415 p., 20,90 €


Merci aux éditions Albin Michel et tout particulièrement à Aude pour cette agréable lecture-frisson. Pour en savoir plus sur Lisa Gardner, cliquez ici ou .

Photo DR

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30 septembre 2010 4 30 /09 /septembre /2010 08:30

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Nous, les bons vivants
publié aux éditions du Rocher est une bouffée d’air pur. Une parenthèse où le mot plaisir est à l’honneur. Ce même plaisir que prennent Emmanuelle de Boysson et Claude-Henry du Bord à démonter une par une toutes les règles présentées comme autant de garanties à notre bien-être. En ce début d’automne, Nous, les bons vivants est idéal pour garder le sourire. A mettre entre les mains des tristes donneurs de leçons pour qu’ils se dérident un peu, s’ils en sont encore capables…

Mademoiselle

 

Extraits :

« Le bon ou le bien vivant est, un peu précipitamment, assimilé à un égoïste chronique : rien de plus faux, il excelle à être bien dans sa peau, dans sa vie, dans sa tête, comme disent les jeunes, pour être une agréable compagnie, devenir un agrément, un eprésence que l’on recherche au lieu  de la fuir. Autre paradoxe : il se porterait mal, ses examens sanguins seraient dignes du livre des records ; pis encore, son attitude serait suicidaire, il n’aurait même pas le respect de lui-même – c’est dire son degré d’inhumanité. »

 

« Acceptons, sans paniquer, d’être mortel, d’avoir un droit de passage en guise de passeport et de vouloir le remplir au mieux ; qu’il y ait ou pas au-delà, il commence ici ; acceptons de jouir de tout ce dont nous ne sommes que les dépositaires, avec toute la responsabilité que cette charge suppose. Sans doute est-ce en ce sens qu’il faut comprendre le mot de Nietzsche : Plutôt que la vie éternelle, l’éternelle vivacité » _, être tendu vers le vivant, s’exalter pour cette part sauvage en soi qui n’est pas pour autant barbarie et qui n’a rien en commun avec la pensée molle, la morale flasque de ceux qui prennent la vie autrement que le large et préfère flotter entre deux eaux tièdes comme un banc de méduse. »

Emmanuelle de Boysson et Claude-Henry du Bord, Nous, les bons vivants, éd. du Rocher, 184 p., 17 €

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30 septembre 2010 4 30 /09 /septembre /2010 07:00

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"On dit que les fautes des pères retombent sur les fils. C'est vrai, c'est archi-vrai, les fautes des pères retombent sur les fils, celles des grands-parents sur les petits-enfants, celles des arrières-grands-parents sur les arrières-pertits-enfants. Il y a des vérités qui apportent un sentiment de libération et d'autres qui imposent le sens du terrible."

Va où ton coeur te porte,
Susanna Tamaro

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 06:23

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Mon nom est Jamaica
de José Manuel Fajardo est un livre qui vous emmène très loin.
Roman d’érudition, rythmé et violent, Mon nom est Jamaica entraine le lecteur à travers l’espace et le temps. Et c’est à bout de souffle mais aussi à regret qu’on referme ce livre tant il se dévore avec avidité. Cette même avidité que Santiago, pardon Jamaïca, mettra à défier la terre entière, à aller au bout de sa folie… pour mieux en revenir, peut-être. Veuf depuis deux ans, Santiago, la cinquantaine, vient de perdre son fils. Du jour au lendemain, une certitude l’étreint : « Je suis juif ». Son amie, Dana, tente de comprendre alors que, déjà, Santiago entre dans la peau de Jamaica. D’où vient ce personnage ? Dana découvre finalement son existence dans un texte du XVIIe siècle. Première coïncidence d’une longue série… De son côté, Santiago malheureux comme les pierres, sombre dans la folie… pour mieux en revenir peut-être. Tout commence en Israël, se poursuit en France, où les émeutes font rage dans la banlieue parisienne, puis en Espagne, avec un détour historique par l’Amérique du Sud. Dans ce roman haletant, on court après les mots, pour comprendre ne serait-ce qu’une infime partie du mal qui ronge Santiago. Cet écorché vif qui à la faveur d’un train parti sans lui, change de vie.

José Manuel Fajardo, Mon nom est Jamaïca, Traduit de l’espagnol par Claude Bleton, Métailié, 303 p., 21 €

Extrait : « « Je veux le voir », répliqua-t-il. « Voir quoi ? » Il me lança un nouveau regard : « Le chaos ». Là, je commençais à m’inquiéter vraiment, mais je n’osai rien répondre, je me redressai sur mon siège et sondai la nuit en priant pour que cette parole reste un vœu pieux. On avançait lentement, on ne voyait pas grand-chose sur les trottoirs mal éclairés, et je réalisai que Tiago n’avait pas allumé les phares, je le lui dis, mais il me répondit qu’on n’en avait pas besoin, « comme ça, nous sommes presque des fantômes ». »

Merci à Laura des éditions Métailié pour cette belle découverte.   

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28 septembre 2010 2 28 /09 /septembre /2010 14:36

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De temps en temps, Les petits papiers de Mademoiselle, accueillent un auteur qui vient nous parler de cette période, un peu hors du temps, entre deux romans. Après Annie Degroote, Patrick J. Lambert a accepté de se plier à l’exercice.
De formation anglo-saxonne, Patrick J. Lambert a vécu plus de vingt ans à l’étranger (Asie, Océanie, Europe, Pays Arabes) où il a travaillé comme trader sur les marchés financiers. Il est aujourd’hui consultant auprès d’une grande société française. Son premier livre Le vengeur des catacombes, publié en 2007 chez Fayard, a reçu le prix du Quai des Orfèvres 2008. L’auteur de polar, désormais reconnu, poursuit avec Morofisc aux éditions Plon. Son dernier livre, Les murmures des tombeaux, est paru en mai dernier chez First.

 

Que fait un auteur de polars entre deux romans ?

Existe-t-il vraiment un moment entre deux romans ? Je n’en suis pas certain. Sortir un roman par an ne m’autorise pas vraiment à prendre plusieurs mois sabbatiques. En ce jour, par exemple, alors que je suis en train d’écrire les 50 dernières pages du roman qui suivra Les murmures du tombeau, je réfléchis déjà au thème que je compte aborder par la suite.


Combien de temps mettez-vous à écrire de nouveau après la remise d’un manuscrit ?

Il n’est pas rare que l’achèvement d’un roman se traduise par un brusque « coup de mou » que certains auteurs aventureux compareront à une forme de déprime post-natale mais, dans mon cas, elle excède rarement une quinzaine de jours avant que le besoin d’écrire ne se fasse ressentir de nouveau.

 

Aux lecteurs qui ne vous connaissent pas encore, vous conseillez votre dernier livre Les murmures du tombeau, est-on toujours plus fier de son dernier roman ? Et alors n’a-t-on pas peur de faire moins bien par la suite ?

Un artiste s’améliore par la pratique quotidienne. C’est un peu la même chose pour un auteur qui apprend de chaque roman. Non seulement par lui-même, en travaillant, en affinant sa façon d’écrire, mais tout autant en considérant les ressentis que ses lecteurs mettent en avant.

Lorsqu’on publie plusieurs romans, on aura souvent l’impression que le dernier texte paru intègre la somme de cet apprentissage constant et qu’il en sera donc meilleur.

Quant au doute, il est toujours présent dans l’esprit d’un auteur quels que soient les lauriers qu’on puisse lui tresser. Même en faisant de notre mieux, nous savons tous, ceux d’entre nous qui sont restés humbles tout du moins, que le lecteur décidera in fine et qu’il a toujours raison.

 

Qu’est-ce qui est, pour vous, essentiel de faire entre deux romans pour mieux repartir ensuite ?

Rien de particulier. Ce qu’il faut surtout, c’est ne pas oublier de vivre pendant les romans.


Pouvez-vous nous parler du roman que vous êtes sur le point de terminer ?

Je ne peux pas encore en dire grand-chose, sauf qu’il s’agira comme le précédent d’un thriller/roman d’aventures tirant son énigme de l’Histoire. Sortie prévue aux environs de mars 2011.

 

Que voudriez-vous que celui-ci ait de plus que les autres ?

Qu’il soit encore meilleur que le précédent. Que chaque roman que j’écris par la suite donne plus de plaisir aux lecteurs. Ce sont eux, les juges ultimes.

Merci Patrick.

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27 septembre 2010 1 27 /09 /septembre /2010 11:53

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Dans le comté du Sussex, en Angleterre, Virginia Woolf et son mari Léonard, ont acheté en 1919 un petit cottage, Monk's House, dans le village de Rodmell. Une maison sans prétention, qu'elle a rendue confortable au fil des ans grâce à ses droits d'auteur. Sa présence est encore perceptible dans le séjour où trône son fauteuil favori, comme dans sa chambre ouverte sur un jardin. Au fond de ce havre luxuriant, elle avait installé un bureau sommaire dans une cabane, où elle travaillait chaque matin. C'est là qu'elle écrira notamment Mrs Dalloway en 1925, la Promenade au Phare en 1927, et Orlando en 1928. Début novembre 1940, une bombe allemande fait exploser les berges de l'Ouse presque jusqu'à Monk's House. Cinq mois plus tard, l'Ouse retrouvait son lit et Virginia s'y glissait et se noyait. Je referme ici les portes des "Maisons d'écrivains". Une série que vous aurez eu, j'espère, autant de plaisir à suivre que j'ai eu à l'écrire.
    
 


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26 septembre 2010 7 26 /09 /septembre /2010 06:32

Les petits papiers de Mademoiselle accueillent aujourd’hui Laure-Marie Lapouge, auteur de Moi, Ghisla, sœur de Charlemagne, un roman historique au ton résolument moderne qui dresse un portrait étonnant et quelque peu dérangeant de l’empereur. A travers les yeux sa sœur, Ghisla, le lecteur (re)découvre un homme tiraillé et ambigu. Sortie en librairie le 1er octobre, aux éditions Albin Michel.

 

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Comment vous est venue l’idée d’écrire un livre sur Ghisla, la sœur de Charlemagne ?
En fait, j’ai commencé par « inventer » Ghisla, avant de découvrir qu’elle avait réellement existé… Je m’explique : il y a quelques années, j’ai commencé à réfléchir sur la possibilité d’écrire un livre racontant un amour entre un roi et sa sœur. Ce thème m’a intéressée non pour des raisons personnelles – on m’a posé la question, et donc, non, il ne s’agit pas d’une espèce d’autofiction déguisée que j’aurais imaginée parce que j’aurais moi-même vécu une histoire comparable – mais à la suite de lectures concernant les anciens Indo-Européens et le fait que dans les familles dirigeantes, ces « incestes » frères-sœurs avaient alors été sans doute plus répandus qu’on ne le pense. J’ai donc cherché un roi auquel je pourrais attribuer une sœur imaginaire et un amour de ce type, un amour se heurtant à un interdit, un peu comme dans la légende de Tristan et Yseult. J’ai lu pas mal de choses sur les rois mérovingiens et dans la foulée, j’ai découvert Charlemagne, que je connaissais très mal, et qui m’a fascinée – de même que la période de son règne. Me voilà donc en train d’inventer une sœur de Charlemagne et d’inventer un amour entre lui et cette sœur de fiction. Là-dessus, poursuivant mes recherches sur son règne, je découvre que pendant tout le Moyen Age, une légende a couru racontant que Charlemagne avait un lourd péché sur la conscience : un amour coupable pour sa sœur… Laquelle sœur, je le découvre aussi, avait donc bien existé, s’appelait Ghisla – on la présente aussi sous le nom contemporain de Gisèle, issu de ce prénom ancien -, avait vécu entre 757 et 810, et avait été abbesse laïque de trois abbayes dont le grand monastère de Chelles. A ce stade, j’ai été quelque peu « coincée » : si j’avais toute seule dans mon coin imaginé une histoire qui se révélait avoir été une légende – et peut-être, une réalité - c’était à moi d’écrire cette histoire !

 

J’imagine que vous vous êtes beaucoup documentée, comment avez-vous organisé vos investigations ?

J’ai en effet mené une longue recherche sur la période et sur le règne de Charlemagne. J’ai lu à peu près tout ce qui existe – livres des historiens, sagas anciennes liées à ce règne comme la Chanson de Roland, biographie ou textes de l’époque, etc. Au bout d’un moment, je me suis retrouvée à la tête d’une masse énorme d’informations, et j’ai dû, pour m’y retrouver, faire des fiches, par thèmes, et aussi par années de règne. C’est pourquoi, dans le livre, à part les détails concernant cet amour interdit, ainsi que les liens de Ghisla avec Augier, Rodland et Ganelon ou le « dédoublement » de Rodland-Roland, tout l’arrière-plan est historique, depuis les noms de la grande majorité des personnages secondaires jusqu’aux endroits, palais ou monastères où se trouvent les personnages à telle ou telle date, en passant, évidemment, par les grands événements du règne (mort de Carloman, guerres, etc.) et les éléments de la vie quotidienne, comme les bains dans les thermes, les très fréquents déplacements à cheval ou en chariot, ou la séance de patinage. J’ai par exemple vu une chaussure de patinage de l’époque retrouvée lors de fouilles archéologiques.

 

Le langage de Ghisla est parfois peu châtié, souvent moderne, était-ce une façon de sortir du style compassé qu’ont parfois les romans historiques ?

Tout à fait. C’est un parti pris personnel. Je suis persuadée que les gens, il y a 500, 1 000 ou 5 000 ans, parlaient comme nous, dans leur langue à eux, bien sûr, mais qu’ils pestaient, juraient, ou disaient des bêtises, comme nous. Ils ne s’exprimaient pas comme dans les mauvais téléfilms historiques, où l’on nous colle quatre subjonctifs par phrases… De plus, les langues que l’on parlait à l’époque ont complètement disparu. On sait par exemple que Charlemagne parlait neuf langues, le latin, le grec, mais aussi le francique, le thuringien, l’alaman, etc. Aujourd’hui, toutes ces langues sont non seulement mortes mais complètement oubliées. Ces langages du VIIIe siècle ont par la suite constitué la matrice dont sont sortis l’ancien français et le haut allemand, mais ces dernières n’existaient pas encore vraiment au VIIIe siècle. Les quelques textes cités (lettres des papes, par exemple) sont la traduction de textes rédigés en latin. N’ayant pas de références du langage de l’époque, j'ai donc décidé de faire parler mes personnages en français contemporain.

 

Dans Moi, Ghisla, sœur de Charlemagne, on découvre une femme de caractère, est-ce là aussi un parti pris ou avez-vous trouvé des documents attestant de sa force de caractère ?

Je n’y ai pas vraiment réfléchi. Cela s’est imposé comme ça… J’avais affaire à une femme qui est la sœur d’un roi dont on sait que c’était un homme de caractère et la fille d’une femme – Bertrade – dont on sait également que c’était sans doute une femme puissante et autoritaire. J’ai simplement supposé qu’elle leur ressemblait, je n’imaginais pas une petite dame fragile sortant de cette famille… De plus je savais qu’il s’agissait de ce que nous pourrions appeler, en employant un mot qui n’existait pas à l’époque, une intellectuelle. Elle a rédigé des livres, elle a été la correspondante privilégiée du grand lettré de l’époque, Alcuin... J’avais donc, pour laisser émerger ce personnage, deux pistes principales : la force de caractère propre à cette famille, et la grande curiosité intellectuelle.

Enfin, je tenais à ce que cette histoire "d'amour interdit" n'ait rien à voir avec ce qu'évoque actuellement presque automatiquement le mot "inceste", qui est aujourd'hui lié avant tout au viol et à la pédophilie, et donc à une relation de pouvoir de l'un sur l'autre, de violence faite à l'un par l'autre. C'est d'ailleurs pourquoi je n'ai jamais été tentée de raconter un "inceste" intergénérationnel (père fille par exemple) car le fait que l'un soit un des parents lui accorde d'emblée un pouvoir sur l'autre. Un frère et une sœur sont davantage égaux. Mais avec Charlemagne comme protagoniste masculin, j'avais affaire à un personnage d'envergure, particulièrement puissant. Je tenais donc à ce que sa sœur reste elle aussi, tout au long de l'histoire - ou plutôt, devienne de plus en plus, au fur et à mesure qu'elle vieillit, un personnage puissant, capable de rester l'égale de son frère, de manière à éviter cet écueil de la violence imposée par un fort à un faible que peut évoquer le mot inceste.

 

Merci Laure-Marie.

Bio express : Laure-Marie Lapouge a fait des études de philosophie sous la houlette de gens comme Michel Foucault et Gilles Deleuze avant d’entrer au CFJ à Paris. Elle débute sa carrière à l’AFP, où elle restera dix ans. Mais l’envie de changer d’air est plus forte, elle devient donc pigiste dans la presse féminine, puis rédactrice en chef d’une revue d’astrologie, et à nouveau, pigiste, notamment pour Femme Actuelle. Moi, Ghisla, sœur de Charlemagne est son premier roman.

Photo DR

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